Le vote de la loi immigration, après une commission mixte paritaire directement pilotée par l’Élysée au mépris de la séparation des pouvoirs, clôture une année 2023 politique et sociale brutale par de nombreux aspects. De la réforme des retraites qui va rajouter deux ans de travail à la non-réponse aux violences policières après le meurtre de Nahel, la tendance de fond qui se dessine est celle d’une régression des droits fondamentaux.
La loi immigration n’est pas une simple stratégie de diversion. C’est un projet de société régressif, autoritaire et réactionnaire que porte ce gouvernement, bras armé d’une partie de la bourgeoisie qui foule aux pieds les principes républicains. Malgré les interpellations de corps intermédiaires contre cette loi, de la gauche et du mouvement social bien sûr, mais aussi d’universitaires, du corps médical, voire de soutiens de la première heure au macronisme, le président déroule une stratégie délibérée et pensée.
Alors que nous affrontons de nombreuses crises, sociale, politique, économique, démocratique et même institutionnelle, que les colères populaires éclatent ou couvent, le président est prêt à tout pour sauvegarder les intérêts du capital. La loi n’est pas examinée à l’Assemblée nationale. Le coup de force, main dans la main avec une droite sénatoriale radicalisée s’alignant sur les vieilles lubies lepénistes, a donc été imposé. Certains se veulent rassurants, car le Conseil constitutionnel écarterait les dispositions les plus régressives de la loi. Mais le simple fait d’avoir voté des mesures discriminantes, même temporairement, est un terrible marqueur. Restriction du droit du sol et du regroupement familial, caution pour les étudiants étrangers, retour du délit de séjour irrégulier, double peine, préférence nationale pour les prestations sociales… les idées d’extrême droite sont maintenant posées dans une loi. Ce vent mauvais souffle partout dans le monde, y compris sur notre continent, de l’Italie aux Pays-Bas et à la Hongrie ; en témoigne aussi le renforcement de l’Europe forteresse avec le pacte « migrations et asile » adopté ce 20 décembre.
Ne nous trompons pas : la criminalisation des migrants est concomitante de la chasse aux allocataires sociaux, de la précarisation des salariés, de la répression des mouvements sociaux, citoyens et écologiques. Il s’agit d’enfoncer et de fracturer les classes populaires dans un océan de misère sociale, doublé d’un enfer de contrôle administratif. Tout l’inverse du capital qui reçoit chaque année 162 milliards d’euros sans aucun contrôle, ni restrictions.
Ce qu’on prétend préserver pour les nationaux, à condition d’être Français sur plusieurs générations, est donc une chimère pour celles et ceux qui y croient vraiment. Ce gouvernement ne gouverne pas pour le peuple mais pour répondre aux injonctions des marchés financiers et des agences de notation. Il convoque chaque jour la République, dont il prétend porter en étendard les valeurs, mais fait le tri entre les « bons » et les « méchants », les Français et les étrangers. Cette même République que M. Macron fait reculer chaque jour par la destruction des services publics avec son libéralisme débridé.
À ce pouvoir qui ne veut qu’attiser la haine et la division, la riposte des communistes, de la gauche sociale et écologique, des progressistes, démocrates et républicains sincères doit s’incarner rapidement dans un mouvement populaire de solidarité pour rejeter cette loi infâme et, au-delà, ce climat suffocant.