Quand on est à court d’arguments, quand on manque aussi d’intelligence voire d’honnêteté, le mieux est de recourir au mensonge et à la calomnie pour discréditer ses contradicteurs.
La réforme des retraites est impopulaire, tout le monde en convient désormais. Le rejet du report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite est massif. Le soutien aux mobilisations est également puissant comme la part de salariés non syndiqués qui viennent grossir les rangs des cortèges. Le mouvement est exemplaire dans son message unitaire et dans ses modes d’action.
Il faut bien dès lors trouver des angles d’attaque pour discréditer le mouvement. C’est ce que font les éditocrates et autres experts libéraux. A ce compte, il s’agit d’isoler la petite phrase de tel parlementaire de la NUPES ou d’un syndicaliste. Si parfois des gestes et des mots sont inacceptables et ne font pas avancer le débat démocratique et ne ressemble en rien à notre tradition communiste, il ne faut pas éluder cette stratégie du pourrissement.
Après avoir échoué à montrer un visage pseudo-social du RN qui s’oppose au mouvement social et défend bel et bien une retraite à 62 ans pour la majorité des salariés, voilà qu’on nous présente les défenseurs d’un régime par répartition comme des…successeurs de Pétain !
Prenant prétexte que le régime de Vichy avait instauré une Allocation aux vieux travailleurs salariés, voici que le gouvernement fasciste est qualifié de précurseur (sic) d’un régime par répartition. Cette qualification grotesque et insultante est totalement synonyme d’une inculture et d’une mauvaise foi crasse. Cette allocation empruntait à une logique basée sur l’impôt et ne constitue pas du tout un système contributif, instauré après guerre sous la pression du mouvement ouvrier. L’ordonnance du 4 octobre 1945 instituant la Sécurité sociale définit un vrai régime par répartition, contributif à partir des cotisations et donc basé sur la création de la valeur ajoutée. Ce système, où la gestion par les travailleurs était la clé, est issu de décennies de luttes ouvrières. Quant à invoquer l’histoire, on pourrait rappeler que le premier système de retraite a été institué par Colbert. Pour autant, celles et ceux qui aspirent à une retraite à taux plein à 60 ans n’ont rien de monarchistes ni d’esclavagistes.
D’ailleurs, et c’est là que la mauvaise foi se poursuit, c’est Jean Jaurès qui est désormais convoqué pour défendre…la capitalisation ! Il est vrai qu’en 1910, Jean Jaurès a défendu ce concept qui n’a pas le sens d’aujourd’hui. Il s’agissait à l’époque des caisses de retraites de certains corps de métiers, à la pointe de la lutte sociale que des travailleurs ont d’ailleurs parfois payée au prix de leur vie. Cela concernait des métiers très exposés à des risques professionnels. Les compromis sociaux permettaient ainsi de bénéficier d’une pension, de réversion notamment, et de financer un certain nombre de programmes sociaux dont les logements. La répartition, d’inspiration bismarckienne, n’avait alors pas fait ses preuves en France dans un pays rongé par l’anti-germanisme tout comme le modèle dit beveridgien où le système de retraite se finançait par l’imposition. Jaurès avait donc bien raison de soutenir une capitalisation qui était plus avancée socialement sur le financement mais aussi la gestion puisque les salariés étaient associés dans la démarche. A ce titre, il était dans la lignée des mouvements mutuellistes et de solidarité ouvrière initiés dès le 19e siècle et qui inspireront les avancées majeures du Conseil National de la Résistance.
A regarder l’étymologie du mot économie, cela signifie « gestion de la maison ». Peut-être que certains économistes libéraux devraient en revenir à cette définition initiale tant leurs connaissances des mécanismes économiques contemporains est à revoir.
A tous ces professeurs de mauvaise foi et confusionnistes en tout genre, il serait bon de louer l’esprit de responsabilité et de sang-froid des manifestants, des organisations syndicales unies et déterminées. C’est bien cela qui effraie les libéraux et les défenseurs d’un projet de loi qui n’a aucune légitimité populaire.