Cette réforme des retraites est injuste à plus d’un titre. Elle se déploie dans un contexte de chômage de masse, de précarité au travail qui ne fait qu’accroitre. Malgré cela, le gouvernement ne se prive pas d’user d’arguments éhontés pour défendre des fausses mesures progressistes, de prendre en compte les plus fragiles. Ce sont pourtant bien les publics les plus précarisés, les plus en difficulté qui seront les plus impactés et qui seront de fait, privés du droit à une retraite pleine et entière.
Séniors : une paupérisation qui progresse
Le taux de pauvreté des retraités a augmenté depuis dix ans : coût de la vie, premiers effets réformes précédentes. Risque vulnérabilité retraités : dépendance, emprise
Prenons d’abord la situation des séniors, celles et ceux qui sont en situation d’entrer en retraite dans quelques mois. Lourdement ciblés par le nouveau dispositif d’assurance-chômage, qui prévoit de réduire la durée d’indemnisation des plus de 55 ans, plongeant cette population encore plus dans la précarité. Le taux d’activité des séniors est plus faible que chez nos voisins européens, lié au fait que les entreprises privilégient les licenciements de cette tranche d’âge dont les salaires sont souvent les plus élevés. A cela s’ajoute une dégradation du niveau des pensions depuis l’application des réformes repoussant l’âge de départ en retraite malgré une garantie de pension à 85% du SMIC qui est promise depuis…2003. C’est une paupérisation des retraités qui va s’accélérer. Les inscriptions de ces tranches d’âge qui entrent dans l’âge de la retraite, dont 7% avec une décote, dans les dispositifs d’aide alimentaire doivent nous alerter. Déjà cibles d’arnaques régulières, ces publics pourraient se retrouver à être les proies de réseaux promettant des sources de revenus mirobolantes pour ponctionner ces personnes vulnérables. La réforme va accélérer le retour à une condition sociale dégradée comme cela était le cas avant l’instauration de la réforme à 60 ans.
En clair, la paupérisation des retraités va s’accélérer parce que l’emploi des séniors est dégradé et que les pensions seront insuffisantes. Le couperet est d’autant plus violent pour tous ces séniors qui voient leur carrière prolongée de plusieurs mois avec le projet de loi quand beaucoup ont commencé à se projeter dans un après-travail.
Femmes : une vie de précarité et de carrière hachée
Parce qu’elles constituent un des contingents de salariés les plus exposés aux inégalités, les femmes seront des victimes évidentes du prolongement de l’âge légal de départ. Temps partiel subi, arrivée plus tardive (en raison d’études plus longues, périodes de grossesse) dans l’emploi stable, discriminations : les carrières professionnelles des femmes sont plus irrégulières quand elles sont parfois souterraines et non-déclarées dans des entreprises familiales (agricoles, petites et moyennes entreprises). Il est à noter également que les femmes sont majoritaires dans les secteurs professionnels parmi les plus atteints par l’austérité, l’emploi public dégradé de l’Education nationale à l’hôpital public.
Avec une retraite moyenne d’un montant de 1049 euros, il est peu de dire que les femmes seront encore plus impactées. C’est le fruit d’une inégalité structurelle sur le marché du travail avec un salaire en moyenne inférieur de 30% ! La paupérisation des femmes est en marche sans action forte d’égalité au travail !
Jeunes : une question d’avenir
Les experts en tout genre, la droite posent d’emblée la ligne rouge : les jeunes ne sont pas concernés par la réforme des retraites ! Pourtant, ces futur·e·s travailleur·se·s ont leur mot à dire. Parce que les réformes se succèdent pour en faire de la chaire à « employabilité », les jeunes générations se voient apposer une chape de plomb : point de retraite dans la jungle du marché capitaliste.
Et pourtant…C’est bien parce que la peur d’une jeunesse consciente de cet enjeu effraie le capital qu’il faut mobiliser cette frange de la population. Avec un âge moyen d’entrée dans l’emploi significatif, qui masque des disparités de parcours diverses, la possibilité d’un parcours complet paraît bien illusoire dans les conditions actuelles. La myriade de dispositifs de contrats précaires et de travail gratuit (services civiques notamment) alimentent des années de parcours qui seront difficiles à comptabiliser dans les trimestres. C’est une accoutumance à la précarité que veut donc organiser le capital.
Enfin, parce que beaucoup de séniors, de femmes et de jeunes sont concernés ensemble par la précarité, formant le gros des contrats courts, des intérimaires, des saisonniers, ce sont les métiers des secteurs les moins syndiqués, les plus enclins à la rotation rapide de main-d’œuvre, notamment en raison de l’usure, qui sont les plus grandes victimes. C’en est révoltant car ce sont ces salariés qui vont payer les frais d’un appui financier au capital.