En avril dernier, les prix alimentaires ont augmenté d’en moyenne 3% – et la hausse n’est pas près de s’interrompre, puisque le risque est grand d’arriver autour des 5% d’ici le début de l’été. Pour certains aliments, très largement consommés, la hausse est plus importante encore : +15,3% pour les pâtes, +10% pour les huiles, mais on pourrait y ajouter la farine, des steaks hachés, du café, du beurre, du poulet, ou encore de la semoule.
Ces augmentations interviennent suite à la fin des négociations commerciales entre industriels et distributeurs, qui fixent les tarifs annuels des produits, mais également dans un contexte international et national tendu. La guerre déclarée par la Russie de Vladimir Poutine à l’Ukraine a des conséquences sur l’approvisionnement en céréales et en huiles et en France, une épidémie particulièrement grave de grippe aviaire sévit, avec des conséquences sur la volaille et les œufs.
C’est que le modèle agricole et alimentaire favorise ce type de difficultés, en concentrant les productions en monoculture, plus sensibles aux épidémies, tout comme en développant l’élevage intensif qui, outre la maltraitance occasionnée, favorise l’émergence et la transmission rapide et massive des maladies. Sans compter les effets nocifs pour l’environnement.
Face à la hausse des prix, le gouvernement a présenté en mars dernier son « Plan de résilience ». Parmi les diverses mesures, il prévoit de nouvelles négociations entre la Coopération agricole et l’Association nationale des industries alimentaires – mais les tensions sont déjà palpables. La prise en charge d’une part d’une partie surcoût alimentaire pour quatre mois à hauteur de 400 millions d’euros y est également prévue. Un bandage pour pallier l’urgence, sans doute, pourtant, rien n’est évoqué pour transformer notre agriculture, à la fois pour une meilleure qualité alimentaire mais également dans le respect des agriculteurs et agricultrices dont les conditions de travail et de vie sont extrêmement difficiles.
Il en va de même sur la mesure « Sortir de nos dépendances » : rappelons qu’il s’agit là du gouvernement (le futur-ex comme le nouveau, sans aucun doute) qui soutient les traités de libre échange de nouvelle génération, véritable menace sur notre agriculture, la qualité de notre alimentation – et les émissions de CO2 qui résulteraient de la hausse des échanges.
Les salaires, en revanche, n’augmentent pas, ou très peu. Au premier mai, le SMIC augmentait de 2,65%, en lien avec l’inflation constatée entre novembre 2021 et mars 2022. En somme, le SMIC augmente alors que cette inflation est déjà bien installée et que les hausses de prix se poursuivent. Les quelques trente-quatre euros supplémentaires par mois, certes bienvenus, sont très largement insuffisants face aux prix de l’alimentation, de l’énergie, du carburant, etc. Et sans compter l’écrasement des premiers niveaux hiérarchiques dans les branches dont les minima démarrent en-dessous du SMIC. Car si l’on additionne ces factures, qui concernent des dépenses contraintes, comment payer à la fin du mois pour ceux qui ont les plus bas salaires ? Il faut pourtant bien se nourrir, se laver, se chauffer…
Nous avions déjà dans un précédent billet alerté sur ces augmentations, particulièrement sur le volet de l’énergie, et sur la nécessité de bloquer les prix (Bloquons les prix ! le 31 mars dernier). En effet, avec les plans de résilience, les primes, les chèques énergie… nous n’avons là que quelques petites mesures temporaires qui ne changent strictement rien au problème global, qui n’œuvrent en aucun cas à une répartition plus juste des richesses, qui n’apportent aucune augmentation de salaire et, oui, une augmentation des cotisations sociales aussi – et non pas des ”charges” ; ces cotisations font vivre notre Sécurité sociale et nos retraites !
En effet, l’augmentation des salaires, des pensions, et le dégel du point d’indice sont absolument nécessaires ; mais alors que huit millions de Françaises et de Français se tournent vers l’aide alimentaire, le blocage des prix alimentaires et des produits de première nécessité est un impératif, et une urgence.
Dans cette période difficile, il est malheureusement fort probable que les associations d’aide alimentaire seront plus fortement encore mises à contribution. Nous ne pouvons qu’appeler à l’écoute de leurs observations et à la solidarité.
Surtout, la transition écologique, tout particulièrement dans ce secteur, est plus qu’urgente, elle est vitale, alors que de nombreux territoires sont en alerte sécheresse et que les impacts du changement climatiques se font déjà sentir.