Marine Le Pen vient d’être condamnée, en 1ère instance, à 4 ans de prison, dont deux ans ferme, aménageables avec un bracelet électronique, 100 000 euros d’amende et une peine d’inéligibilité de 5 ans assortie d’une exécution immédiate, dans l’affaire des assistants parlementaires du Front National au Parlement Européen. Annonçant faire appel de cette décision, ses chances de se présenter à l’élection présidentielle sont toutefois compromises, même si tout semble être fait pour finalement accélérer le calendrier judiciaire.
Les autres prévenus du procès en détournement de fonds européens ont tous été déclarés coupables, montrant l’ampleur du système mis en place pendant des années, avec le rôle central de celle qui reste pour Députée du Pas-de-Calais, jusqu’à l’issue définitive du procès.
Fidèles à leur diatribe victimaire, Marine Le Pen et ses consorts du RN crient depuis au procès politique, sur tous les plateaux télé, dans toutes les matinales des radios, « Des pratiques que l’on croyait réservées aux régimes autoritaires », « une décision politique pour m’empêcher de me présenter et d’être élue », « une violation de l’État de droit » « la tyrannie des Juges ».
Ce dimanche, le RN a même tenu un meeting avec pour mot d’ordre #sauvonsladémocratie. Une stratégie de défense qui rappelle celle de Trump durant la campagne des élections américaines. Sans surprise, les réactionnaires de plusieurs pays, d’Orban au Porte-Parole de Poutine, en passant par Elon Musk, ont volé au secours de Marine Le Pen, en lui apportant leur soutien allant même jusqu’à un honteux ‘’#jesuisMarine’’.
Cela dit beaucoup de leur conception commune de la justice.
En bons complotistes, ils sont persuadés que la justice est mise au pas pour les empêcher d’accéder au pouvoir. Une machination infernale se serait mise en marche pour persécuter le RN. Cette vérité alternative paranoïaque peut malheureusement trouver de l’écho chez les électeurs et électrices du RN et renforcer l’adhésion à leurs idées.
La mise en accusation contre la justice française est aussi violente que malhonnête, notamment par ceux qui se sont toujours présentés comme les chantres de la probité, de l’exemplarité et de la moralité. Les mêmes qui se réclament ‘’hors-système’’ et brandissent leur étendard du ‘’tous pourris, sauf nous’’, voient leur image de sainte et saints, éborgnée.
Loin de reconnaitre ses fautes, Marine Le Pen ose évoquer un simple désaccord administratif. Avec un préjudice estimé à 4 millions d’euros, ce désaccord n’est pas qu’un détail de l’histoire..
Les mêmes qui prônent une plus grande fermeté et l’alourdissement des peines pour d’autres affaires, dénonçant par la même, le laxisme de la gauche, ont inversé leurs positionnements et leurs discours en quelques instants. Ce qui était valable, ne l’est plus ! La délinquance est à géométrie variable.
Par leur réaction, ils remettent en cause l’autonomie et l’impartialité des juges. Ils refusent l’égalité de toutes et tous devant la loi.
Pour le RN et d’autres, la justice n’est plus garante du droit et des institutions. Ce qu’ils omettent, c’est que ce ne sont pas les juges qui font la loi, mais bien le législateur, et en l’occurrence, l’exécution immédiate de la peine d’inéligibilité en cas de détournement de fonds, a été adopté par le Parlement en 2016 et même votée par la nièce de Marine Le Pen, alors députée FN.
Quoiqu’il en soit, cette condamnation historique rebat les cartes politiques et complexifie l’équation pour le gouvernement qui avait fait du RN, l’un de ses interlocuteurs privilégiés pour obtenir une majorité sur les textes. Le Premier Ministre s’est dit ‘’troublé’’ par cette décision de justice. Ce trouble suffira-t-il à lui éviter une censure et de nouvelles élections législatives anticipées ? Avec le risque toujours bien présent de voir le RN, voire Marine le Pen, elle-même, accéder à Matignon..
La mort politique qu’elle dénonce est donc bien relative. La démocratie est bien vivante.