Récemment nommé, et pourtant, à portée de censure comme son prédécesseur, François Bayrou a pourtant décidé de s’affranchir des derniers principes républicains dont il faisait encore mine de posséder. Nous connaissions ses penchants conservateurs, avec ses positionnements contre le mariage pour tous, contre l’IVG, nous le découvrons dans un autre registre, raciste, cette fois-ci. Cela dit, les deux vont souvent de pair…
En affirmant qu’il existe « un sentiment de submersion migratoire » , Bayrou franchit un cap, en reprenant à son compte les éléments de langage de l’extrême droite.
Il ne s’agit ni d’une maladresse ni d’une outrance prononcée dans le feu d’une interview, quoique tout autant injustifiables. Le premier Ministre a maintenu ses propos, sans honte, sans regret, les assumant parfaitement.
Cet acte est un appel du pied envers le Rassemblement National et ses députés pour espérer éviter la censure. En utilisant le même vocabulaire, Bayrou légitime encore un peu plus le parti d’extrême-droite. Un député RN s’est même réjoui d’avoir emporté la bataille idéologique.
Quelques semaines après la mort de Jean-Marie Le Pen, déjà largement réhabilité par Bayrou, le premier ministre récidive donc sans vergogne.
Ces faits sont extrêmement graves, dans un moment où la menace est grande, à très court terme, en cas de législatives anticipées, que le parti de Bardella accède cette fois-ci au pouvoir.
Ces propos sont racistes, xénophobes et reposent sur une réalité déformée et fantasmée. Ils sont une insulte à notre histoire commune, à notre tradition de terre d’accueil, à nos valeurs humanistes.
Cette submersion supposée vise des femmes et des hommes qui font vivre nos services publics, qui font rayonner la France. Ce sont nos voisins, nos amis, nos aïeux. C’est, par ailleurs, occulter la réalité d’une partie du monde qui fuit la misère, la guerre, et espère trouver une vie meilleure.
Dérouler de telles affirmations sur la place publique s’inscrit dans une lente et longue dérive où la parole raciste est devenue banale, où les vérités alternatives sont assénées de façon péremptoire et prises pour argent comptant. .
Ces propos tenus par un premier ministre d’un gouvernement illégitime sont totalement irresponsables.
La nouvelle circulaire du Ministre de l’Intérieur, durcissant les conditions d’accès à un titre de séjour, la volonté de réformer l’AME, viennent compléter cette panoplie xénophobe et cet état d’esprit qui se répand dans le pays. L’étranger, l’autre n’est plus le bienvenue. Il est la cible, le responsable de tous les maux de la société.
Cette tendance est globale et Bayrou se sent peut-être autorisé à de tels propos que parce que le monde entier s’engouffre dans la pensée réactionnaire. Milei, Méloni, l’AFD, Trump rivalisent de propos et de décisions politiques racistes. A peine de retour à la Maison Blanche que Trump expulse des migrants et exprime les pires discours sur l’immigration, bien aidé entre autre par son nouvel ami Musk, maitre des réseaux sociaux.
Plus que jamais le monde risque de basculer, avec l’affrontement de deux lignes, de deux visions. Non pas, d’un côté, les gentils et de l’autre, les méchants, mais celles et ceux qui croient encore à la coopération entre les peuples, au vivre-ensemble, et celles et ceux qui font le choix de la concurrence, de la division, de la haine.
Il est urgent d’inverser cette tendance, de mettre en échec cette défaite de la pensée, de déconstruire les discours empreints de préjugés et de recentrer le débat sur les vrais enjeux d’aujourd’hui et de demain : climat, emploi, conditions de vie, services publics, paix etc.
Tout ceci suppose de rompre avec le capitalisme, allié de l’extrême droite.
Lucie Aubrac disait : « le racisme est la pire plaie de l’humanité. Il triomphe quand on laisse le fascisme prendre le pouvoir »
Alors, à la submersion, préférons la subversion !