Les dernières annonces d’austérité du ministre de l’Économie portent une atteinte inédite aux financements des services publics, notamment celui des arts et de la culture.
En effet, le secteur est touché par une première vague d’annulation de crédits à hauteur de 202 millions d’euros, dont près de 96 millions visent directement le programme de la création artistique.
Des milliers d’emplois sont directement menacés par cette coupe dans le programme 131, qui se décline en trois actions : la première dédiée au spectacle vivant, la seconde appelée à financer les arts visuels, et la troisième orientée vers le soutien à l’emploi et la structuration des professions.
Ces annonces constituent une nouvelle atteinte à l’ensemble de cet écosystème, déjà largement déstabilisé par la sortie complexe de la crise sanitaire, des crises inflationniste et énergétiques.
Si la ligne budgétaire complémentaire « Mieux produire, Mieux diffuser » est conservée – alors que nombre de professionnels ont dénoncé une mise en œuvre chaotique et une logique de concentration dangereuse pour la diversité artistique – il faut constater qu’elle ne pourra pas se déployer dans ce contexte : comme le souligne le SYNDEAC : « Comment en effet chercher à « mieux » produire ou « mieux » diffuser, quand plus personne ne parvient à produire ni à diffuser dans des conditions décentes ? ».
Pour cette année 2023 l’activité artistique est en berne ; et pour cause, les équipes ne peuvent plus produire, les coproducteurs et les diffuseurs voient le disponible pour l’activité artistique se restreindre continuellement.
Contrairement au reste des budgets alloués au service public de l’art et de la culture, les fonds publiques consacrés au Pass Culture, décidé par le seul président de la République, ont quant à eux progressé de manière exponentielle.
En 6 ans, le dispositif a bénéficié de 250 millions sur le budget du ministère de la culture, complétés par une dotation de plus de 50 missions au ministère de l’Éducation nationale pour un montant estimé à 300 millions.
L’écart est de taille, alors qu’en 70 ans de politique culturelle de la décentralisation, le budget alloué par l’État au spectacle vivant (aide aux lieux et aux équipes artistiques) n’a jamais dépassé les 280 millions.
Cette politique du bons d’achat en lieu et place d’une politique publique de médiation et d’exigence artistique fragilise encore le service public de l’art et de la culture, comme cela a été souligné par la Commission des finances du Sénat et la Cour des Comptes, qui ont rendu des conclusions très critiques des premières années d’application du dispositif en juillet 2023.
De même, Madame la ministre de la Culture a exprimé des réserves en mars 2024, considérant que le dispositif « reproduit les inégalités culturelles et sociales » et qu’une réforme était nécessaire.
Ainsi, dans un contexte où les coupes budgétaires sur le programme 131 sont inédites et laissent à craindre des effets dramatiques sur la création artistique et culturelle, l’absence de ciblage du Pass Culture interroge.
Cela, d’autant que les mesures d’austérité viendront encore restreindre davantage le budget des collectivités territoriales, ne leur permettant plus d’assurer leur rôle de premier partenaire des structures artistiques et culturelles de leur territoire.
Aussi, il demande si le gouvernement entend renoncer aux coupes budgétaires annoncées sur le programme 131, si un soutien complémentaire était prévu pour refinancer le service public de l’art et la culture, et si les fonds alloués au Pass Culture allaient faire l’objet d’une étude approfondie afin d’envisager une réallocation.