CETA : stop au déni démocratique

2 Oct 2024

A l’occasion de sa visite au Canada, le Président de la République a réaffirmé tout le bien qu’il pensait de l’accord de traité de libre-échange entre l’Union européenne et ce pays. Appliqué partiellement depuis 7 ans sur la partie des barrières tarifaires (c’est-à-dire l’abaissement des droits de douane), cet accord de «  commerce bilatéral contribue à rendre la vie plus abordable pour nos citoyennes et citoyens et à créer des emplois de qualité des deux côtés de l’Atlantique » aux dires d’Emmanuel Macron et de Justin Trudeau, Premier ministre canadien.

Il a beau en penser le plus grand bien, le président doit se rendre à l’évidence : la représentation nationale n’a pas validé cet accord sur la question des barrières non-tarifaires, c’est-à-dire la convergence des normes sociales, environnementales et de nos services publics. Va-t-il une nouvelle fois piétiner la représentation nationale et donc la démocratie, en jouant un coup de force et en faisant appliquer un texte, rejeté massivement par les Français ?

Le camouflet pour le gouvernement et le Président qu’a représenté le rejet du texte au Sénat en mars dernier, à l’initiative de notre groupe parlementaire CRCE-K, démontre pourtant que le libre-échange débridé fait débat y compris chez les libéraux.

Sur le fond, cet accord comme tant d’autres, représente une mise en concurrence des travailleurs et des travailleuses notamment pour nos éleveurs, et un nivellement par le bas des conditions de travail et des standards de production.

Le CETA édicte en règle le principe de « simplification » et du « moins de normes », soit une dérégulation qui se concrétise par le moins disant sur la qualité des produits. Comment accepter que nous interdisions certains traitements aux animaux jugés dangereux dans le marché unique européen mais qui seraient permis à l’importation ? Demain il sera donc possible de manger du bœuf aux hormones ou nourri aux antibiotiques, alors que nos standards européens l’interdisent pour des raisons sanitaires et de santé publique évidents.

Le moins disant social et écologique avec des produits qui font trois fois le tour de la planète ne peut mener qu’à la catastrophe. Celles et ceux qui pérorent en permanence leur soutien à nos agriculteurs doivent être cohérents.

De plus, en confiant l’arbitrage de litiges à des tribunaux privés, les pouvoirs publics se déresponsabilisent au profit d’acteurs privés qui pourraient changer la législation à leur guise et édicter des normes du business, supérieur aux lois des Etats.

Le coût environnemental, jamais évoqué, doit être souligné car combien de tonnes de marchandises transiteront à l’heure d’un nécessaire changement de nos modes de consommation et de production pour réduire notre empreinte carbone, alors que le ‘’produire local et bio’’ tend à devenir une règle y compris dans nos marchés publics.

«Si quelqu’un est contre le Ceta aujourd’hui, c’est qu’il ne veut plus jamais faire d’accord de commerce avec qui que ce soit parce qu’il est au meilleur standard»  estime Emmanuel Macron.

La mauvaise foi constitue son seul argument car nous sommes favorables à des accords commerciaux basés sur la coopération et les échanges mutuellement avantageux dans lesquels les travailleurs et travailleuses ou l’environnement ne sont pas des variables d’ajustement. Faut-il rappeler que l’on commerce depuis la nuit des temps, bien avant les traités de libre-échange. Demain sans CETA, nous continuerons à vendre nos fromages et vins au Canada et à accueillir leurs produits alimentaires.

En mars, de nombreux sénateurs LR avaient soutenu l’initiative de notre groupe et avaient voté contre le CETA. Aujourd’hui devenus ministres pour 10 d’entres eux (9 sénateurs et sénatrices entrants et Sébastien Lecornu, déjà ministre des Armées et sénateur de l’Eure), vont-ils faire preuve de cohérence en assumant leur position et en refusant ce nouveau coup de force présidentiel ?

Après le rejet par le Sénat français au printemps dernier, le président de la République, et le gouvernement minoritaire qu’il a désigné, doivent laisser le processus démocratique aller au bout. Il faut absolument que le texte soit transmis sans délai à l’Assemblée Nationale pour que les Députés puissent l’examiner et le voter en tout conscience.

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