La France condamnée pour la mort de Rémi Fraisse

5 Mar 2025

Plus de dix ans après la mort de Rémi Fraisse, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) vient de condamner la France pour violation du droit à la vie. 

L’opération de maintien de l’ordre menée par la gendarmerie qui rendue directement responsable d’avoir provoqué la mort du jeune étudiant, bénévole à France Nature Environnement. 

Alors que le gendarme à l’origine du tir de grenade qui a tué Rémi Fraisse a bénéficié d’un non-lieu, la CEDH pointe des « lacunes du cadre juridique et administratif » et des « défaillances de l’encadrement dans la préparation et la conduite des opérations » notamment en raison de l’absence d’un cadre d’emploi précis, de formation sur sa dangerosité et le respect d’une distance de sécurité. 

La plus haute instance judiciaire relève que la France était le « seul pays à utiliser de pareilles munitions d’une dangerosité exceptionnelle »

Pour rappel, Rémi Fraisse est mort suite à l’explosion d’une grenade offensive lancée par un gendarme lors d’affrontements avec des militants écologistes autour du chantier du barrage de Sivens (Tarn) en octobre 2014. Cette nuit-là, les gendarmes avaient reçu ordre de « défendre la zone de vie sur le site de Sivens », le préfet de l’époque avait exigé de leur part une extrême fermeté.  Selon un décompte officiel, la gendarmerie avait alors tiré plus de 700 grenades en tous genres, dont 42 offensives. 

La mort de Rémi Fraisse avait suscité une très vive émotion dans tout le pays et entraînera l’arrêt de l’usage de ces grenades dans les opérations de maintien de l’ordre et l’arrêt des travaux du barrage. 

Ce projet de barrage, porté par le département du Tarn et une partie des agriculteurs locaux opposait deux conceptions de l’agriculture, l’une productiviste et l’autre qui se réclame de l’écologie. Les opposants au projet et différentes instances avaient pointé un cout environnemental et financier très élevé comparativement à un faible nombre d’agriculteurs concernés, un projet surdimensionné et inutile. De plus, le site était classé zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique, avec 94 espèces protégées. Or, il était prévu que le barrage engloutisse sous 1,5 millions de m3 d’eau, près de 60 hectares de milieux naturels : 29 hectares de la forêt de Sivens, certifiée Espace Boisé Classé (EBC), 18 hectares de prairies et 12,7 hectares de la zone humide du Testet. 

10 ans après les faits, la justice et la vérité sont enfin reconnues. Rémi Fraisse est depuis devenu le symbole de la répression d’Etat contre les défenseurs de l’environnement. 

Des violences et une criminalisation qui vont de l’assignation à résidence, aux évacuations militaires, des arrestations arbitraires, aux tentatives de dissolution des Soulèvements de la Terre par exemple, à la qualification ‘’d’éco terroristes’’, voire à des procès. 

Alors que l’urgence climatique est à son paroxysme, l’Etat, notamment depuis le mandat d’Emmanuel Macron, cherche à faire taire et intimider celles et ceux qui luttent pour préserver le vivant et la nature et mènent des actions de désobéissance civile. Un rapport de l’ONU publié en février 2024 notait que « la France est le pire pays d’Europe concernant la répression policière des militants environnementaux. La violence des forces de l’ordre est hors catégorie. Leurs homologues à l’étranger ne comprennent pas la manière dont les Français répondent aux manifestations, ne comprennent pas qu’on puisse user d’une telle violence »

Cette décision de la CEDH doit donc infléchir l’attitude de la France dans sa politique de maintien de l’ordre face à celles et ceux qui dénoncent l’inaction climatique. Pour plus jamais notre pays ne tue d’autres Rémi Fraisse. 

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