Enfin. C’est un immense soulagement pour les Gazaouis. Après 465 jours d’intenses bombardements, de pluies de missiles et de feu, qui se sont abattus indistinctement sur des hôpitaux, des écoles, des bâtiments publics, des abris de fortune accueillant des réfugiés, le cessez-le-feu est entré en vigueur dimanche dernier.
Les otages israéliens comme des prisonniers politiques palestiniens vont retrouver leurs foyers. C’est évidemment heureux car des familles entières, rongées par l’angoisse, espéraient le retour de leurs proches. Et maintenant ? Le 7 octobre 2023 sera un traumatisme à vie pour la société israélienne, qui aura vu 1 200 personnes périr dans une attaque terroriste sans précédent. Cette date aura aussi changé le paysage moyen-oriental.
Les Gazaouis, qui vivent un triple blocus depuis vingt ans, ont déjà connu plusieurs guerres. Elles n’ont jamais été aussi destructrices, puisque l’essentiel du territoire est dévasté. Les estimations sérieuses parlent de plus de 60 000 morts et près de 150 000 blessés graves, soit près de 3 % de la population. L’intention génocidaire est même étudiée pour qualifier ce carnage. Les plaies, les haines, les meurtrissures seront longues à se refermer. Gaza est encore très loin de la paix et d’un État palestinien. Il faut donc tracer une perspective de paix longue et durable, pour qu’un État palestinien libre, viable et démocratique, coexiste aux côtés d’un État israélien.
L’accord qui vient d’être signé est fragile, comme en témoigne le cessez-le-feu entre le Liban et Israël, entré en vigueur fin novembre et difficilement respecté. Deux enjeux majeurs apparaissent. D’abord, un plan international doit organiser l’aide humanitaire pour stopper la famine à Gaza, mais aussi répondre à l’urgence sanitaire en soignant les blessés. La reconstruction des infrastructures nécessitera une coopération d’ampleur. Ensuite, l’autre enjeu réside dans la paix, impossible sans justice.
Nous aurions tort de considérer l’intervention états-unienne comme une concession. Le spectre d’une Cisjordanie annexée par Israël avec l’appui de Washington serait un facteur inflammable, tout comme la continuité du blocus de Gaza. La paix n’adviendra qu’en reconnaissant le droit des Palestiniens, n’en déplaise à Trump, à l’extrême droite israélienne, qui veulent uniquement mettre le Moyen-Orient sous leur coupe. Les Palestiniens ne doivent pas être laissés seuls dans cette affaire. Il y va de la survie du droit international, qui ne peut pas être à géométrie variable.
Le « deux poids, deux mesures » concernant Israël doit cesser. Netanyahou et son cabinet de guerre, comme les dirigeants du Hamas qui sont encore en vie, doivent répondre devant la Cour internationale de justice de crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Les résolutions de l’ONU doivent s’appliquer, la colonisation prendre fin, le mur qui étouffe la Cisjordanie être abattu, et Jérusalem-Est devenir la capitale d’un État palestinien dans les frontières de 1967, seule condition viable pour permettre une paix véritable dans la région.
Pour cela, la France pourrait acter cette reconnaissance maintenant, rompant avec sa diplomatie atone. La probable libération de Marwan Barghouti est un signe d’espoir, tant le « Mandela palestinien » peut contribuer à fédérer les forces palestiniennes pour porter le projet national de libération. L’action diplomatique ne sera utile que si nos mobilisations populaires s’amplifient pour faire entendre l’exigence de justice et de paix. C’est la condition pour ne plus vivre de traumatisme comme le 7 octobre.